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DEFENSE & SECURITE

De la nécessité d’un dialogue permanent entre PME de defense françaises et britanniques

Victanis Advisory Services GmbH
2018-06-10
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Dans des contextes, ceux de l’industrie de défense et des relations bilatérales, où l’improvisation est aussi contre-productive que l’incapacité à s’adapter à de nouveaux paramètres, il existe néanmoins quelques paradigmes intangibles.

Quelques certitudes

I - L’indépendance décisionnelle, pour des pays tels que la France et le Royaume-Uni, passe par la maîtrise de leurs forces militaires, mais aussi par leur capacité à maîtriser le processus de création, de production et d’amélioration de plateformes et systèmes d’armes complexes. Il ne saurait y avoir de souveraineté réelle pour un État, sans capacité à équiper ses forces armées et de sécurité de manière autonome. Il est compréhensible que des plateformes complexes soient conçues et produites en coopération sous réserve que les partenaires gardent une totale maîtrise de leurs emplois. C’est également valable pour des matériels achetés à l’étranger, tels que les Hawkeyes équipant le CDG. Néanmoins certains matériels ou systèmes « vitaux », concourant à notre autonomie, telle la dissuasion nucléaire, les communications spatiales ou le renseignement spatial, doivent être conçus et fabriqués par une BITD locale.

II - Il faut une base industrielle et technologique de défense (BITD) stable et à large spectre composée d’entreprises diversifiées et compétitives nationalement et internationalement leur permettant de maintenir des capacités fortes de R&D. Cette vivacité, cette versatilité se trouvent en France et au Royaume-Uni au sein des PME-PME, le « supply chain level » disent les britanniques. Compte tenu de la réduction drastique des budgets de défense français et britannique et de la très grande segmentation des marchés en Europe, il va devenir indispensable, si nous voulons garder les compétences industrielles nécessaire à notre indépendance, de soutenir les coopérations bilatérales entre PME-PMI françaises et britanniques afin d’encourager la cross fertilisation entre les deux BITD mais plus encore leur capacité commune à se positionner ensemble sur des marchés tiers. Créant ainsi des champions d’opportunité sur un marché donné, nous évitons la monopolisation des marchés défense par un nombre trop restreint de grands groupes de défense et l’appauvrissement des BITD françaises et britanniques dont plus de 70 % sont composés de PME-PMI-ETI. Il y va de l’intérêt des grands groupes eux même trouvant ici un moyen de maintenir leurs fournisseurs critiques et de celui des deux États à maintenir et développer des BITD à large spectre et en capacité de produire des technologies avancées au service de leurs forces armées.

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III - Il faut, pour que les bases industrielles et technologiques de défense au niveau de PME-PMI françaises et britanniques, puissent d’abord dialoguer puis collaborer ensuite, qu’il y ait un soutien politique (membres des parlements et ministres) à cette démarche, que les clusters, trade associations et syndicats d’entreprise y soient associés, enfin que les PME-PMI des deux pays puissent en retirer un bénéfice clair et des résultats probant leur permettant de d’entamer un développement international conjoint. Et c’est là que s’arrêtent les certitudes pour faire place aux questions : comment faire ?

Propositions

Diverses consultations ces derniers mois avec un certains nombres d’acteurs français et britanniques m’amènent à un certains nombres d’observations dont je tire les propositions suivantes : 

Première idée : soutenir la création d'un organisme dédié

Pour avoir un dialogue bilatéral de qualité entre PME, il est indispensable que les deux États soutiennent, non financièrement mais politiquement, la création d’un organisme capable de mettre en œuvre des actions supportant le partenariat franco-britannique à l’échelle des PME-PMI par la mise en place d’actions précises et porteuses de résultats (missions commerciales ciblées, business conférence à thématiques précises, animation d’un réseau d’experts cross-border composé d’anciens officiers militaires et d’experts de l’industries, cross fertilisation inter-clusters, …)

Pourquoi une structure dédiée ? Tout simplement parce qu’une entreprise de défense n’est pas une entreprise produisant des solutions, des services ou des équipements quelconques. Il ne suffit pas de confier à des structures existantes, non spécialisées, une relation bilatérale qui sera avant tout technique et basée sur des compétences complémentaires qui vont nécessiter de la structure dédiée une connaissance fine et précise de deux « supply chain » et de leurs écosystèmes . Pour être capable d’apprécier à leur juste valeur les besoins  des PME-PMI de défense, entendre ce qu’ils disent de leurs besoins et de leurs compétences et, plus encore, comprendre ce qu’ils ne disent pas, il faut des spécialistes, en l’occurrence des acteurs pratiquant le bilatéral franco-britannique au quotidien.

Deuxième idée : partager cette vision avec les industriels et les politiques

C’est sans doute parce que cette vision des choses est partagée des intervenants industriels et politiques des deux pays que cette structure pourra animer un dialogue entre les PME-PMI de défense des deux parties. Français et britanniques ont une approche pragmatique et des objectifs communs, ceci malgré 5 décennies de choix extrêmement divergeant, et souhaitent avant tout maintenir leurs capacités industrielles de défense, clé de l’indépendance à long terme de leurs outils militaires et donc de leurs politiques de défense.

Troisième idée : un soutien à 4 niveaux

Le soutien à la mise en place d'une structure commune de collaboration entre PME doit se faire à quatre niveaux :

  • Industriel par le soutien des grands donneurs d’ordre
  • Politique par le soutien des parlementaires des comités de défense au sein des chambres hautes et basses de chaque parlement
  • Opérationnel par la participation de clusters ou associations d’entreprises (NDI, EEF, MEDEF, Clusters français de défense) et administratif
  • Observation des ministères de la défense français et britanniques.   

Cadre bilatéral – les Traités de Londres signés en 2010 

Les situations françaises et britanniques, malgré des postulats de départ différents, ne sont plus en ce début de siècle, très différentes l’une de l’autre. La conclusion des accords de Londres en 2010 ne fut que le résultats d’un processus s’étalant sur presque deux décennies et s’accélérant avec le retrait des armées britanniques d’Irak et leur difficile re-modélisation. Si le premier traité, nous intéresse moins dans le cadre proposé, car étant  relatif au développement et l'emploi des armes nucléaires, le deuxième traité, entre autres, regarde les transferts de technologies entre les deux BITD, les programmes d'achats d'armements, les échanges d'informations industrielles. L’action présentée en ces lignes, complémentaire de la conférence franco-britannique sur les industries de défense organisée depuis 2014 et d’autres évènements annuels, se placera sous l’égide de ce deuxième traité et devra donner corps à une relation encore trop timide mais au combien nécessaire.

Eric Lambert
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